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  • Véronique Rajaonah Elinoro

A LA RENCONTRE D’EMMANUEL PARRAUD



Emmanuel Parraud
Emmanuel Parraud

Après son film Sac La Mort, Emmanuel Parraud continue de nous plonger dans la réalité de la vie réunionnaise avec son film Maudit!, qui depuis le 1er Juin 2022,

est sorti dans les différentes salles de la Réunion. Nous découvrirons alors l’expression d’amour que cet homme a pour la société réunionnaise.



Comment vous est venue la passion du cinéma ? Etiez-vous plongé dans ce milieu longtemps avant de commencer des films ?


Alors déjà, je ne suis jamais allé au cinéma jusqu'à l’âge de 22 ans. Dans ma famille, on n'allait pas au cinéma. On aurait pu y aller, mais ce n'était pas une habitude.

Et en plus le cinéma, mes parents considéraient que c'était pour les adultes et pas pour les enfants. J'ai vécu la fin des années 70 en France, qui était très politisée et notamment avec le terrorisme d'extrême gauche dont je me sentais très proche. Pour moi, à l’époque je considérais le cinéma comme un art bourgeois qui nous détournait de la question politique de changer la vie. C'est un moyen de fuir ces problèmes plutôt que de foncer. Au tournant des années 80 j’ai compris que rien ne changerait vraiment et tout le milieu militant s’est dissout et je me suis retrouvé très seul. Je suivais des études d’ingénieur agricole. J'ai senti que je ne serais pas agriculteur et que j'allais plutôt travailler dans ce qu'on connaît aujourd'hui de l'agriculture industrielle. Donc voilà les abattoirs ou on tue les vaches à la pelle. Enfin bon, tous ces trucs-là très chimiques et ainsi de suite. Et j'ai commencé à décrocher, à m'ennuyer fortement et une amie m'a dit : “Écoute, va donc prendre des cours de théâtre “ (rires). Et elle me dit “Je sens que

tu pourrais être comédien”. Donc je vais prendre des cours de théâtre, ça se passe plutôt bien.


Et puis un jour, une fille m'a dit :

“Bon, demain on va jouer une scène tous les deux”

J'ai pris le texte et elle continue : “Je fais Marilyn Monroe et toi tu feras un type.”

Et je lui dis très naïvement : ”Qui est Marilyn Monroe?” (rires)


À 22 ans, je ne connaissais pas Marilyn Monroe. Tout le monde a rigolé. Ils se foutaient de ma gueule, avec raison. Et en sortant du cours de théâtre, j'ai poussé la porte du premier cinéma que j'ai vu et je suis tombé sur un film qui m'a marqué. C'était Chinatown de Roman Polanski, et là, je me suis dit : “Oh putain ! Toi qui a été militant et n’a jamais pu changer le monde. Avec le cinéma tu peux construire un monde qui te ressemble ou en tout cas construire un monde qui rassemble un peu mes préoccupations.” Et du coup, au lieu d'être tout seul dans son coin, c'est peut être comme ça que tu pourras recoller les morceaux pour rencontrer les autres. Alors ça, c'est une chose importante pour moi. Certes, le cinéma, c'est quand même le moyen d'aller vers les autres et d'échanger, de fabriquer des choses ensemble pour être moins seuls dans la vie. C'est quelque chose qui est fondamental chez moi. Voilà donc. A partir du jour où je suis allé voir ce film, j'ai vu cinq films par jour au cinéma.


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