- Yves Derhy
Mendelson

Comment le piano est-il venu à toi ?
Ma mère a acheté un piano numérique pour son propre usage et il s'est avéré que c'est moi qui y passait le plus de temps. On m'a alors inscrit au conservatoire mais ce n'était pas trop ma tasse de thé, pas assez expressif et identitaire pour moi. J'avais besoin d'exprimer ce que je ressentais au fond de moi. C'est plus tard que le piano est revenu grâce à un professeur de piano en particulier, très ouvert sur l'improvisation, les musiques modernes et le goût de s'amuser en travaillant. Depuis, j'ai fait mon chemin, en suivant d'un côté un cursus de 3 ans à EMA Réunion de 2015 à 2018, et d'un autre , grâce à la scène en jouant et en jouant encore, en rencontrant pléthore de musiciens, mais aussi à travers une introspection, qui m'a permis d'être connecté profondément à qui je suis. C'est l'improvisation dans le jazz qui m'attire car elle permet d'exprimer son identité, son vécu, au-delà des mots, avec un développement assez philosophique,
mathématique et émotionnel.
Quelles sont tes influences ?
Mes influences sont Herbie Hancock, Chick Corea, Keith Jarrett, McCoy Tyner, Michel Petrucciani, Bill Evans, pour citer les grands pianistes dans le jazz qui ont su m'inspirer.
Je m'inspire également du jazz oritental moderne, notamment Omer Avital, Avishai Cohen, Shai Maestro, Yaron Herman, Omri Mor, Kari Ziad. Je suis obligé de citer aussi Brad Mehldau qui associe la pop, la musique classique, le jazz, de manière très originale et créative. Très ouvert aux autres styles, j'ai eu un penchant, quand je commençais le piano, pour Stevie Wonder, Jerry Lee lewis,
Ray Manzarek ou encore Monty Alexander.
J'écoute énormément de jazz, puisque c'est dans cet univers que j'évolue, mais j'écoute aussi d'autres styles de musique et je m'en inspire pour alimenter ma créativité. C'est vital.
Comment vois-tu la scène locale ?
Je vois la scène locale comme une totale expérience et une recherche permanente. La Réunion est un creuset de diversités qui emprunte beaucoup d'éléments musicaux aux quatre coins du monde, l'Inde, l'Afrique, l'Europe...
Ce vivier stimule et alimente naturellement la créativité. Pour ma part, je reste dans quelque chose qui me correspond, entre musique orientale et jazz. Il y a encore beaucoup à faire, avec toute la richesse que l'on a au fond de soi.
Peut-on vivre de sa passion ?
Oui , si on est déterminé et réellement passionné. J'ai réalisé plus de 400 concerts depuis mes premières notes et j'ai toujours la même soif de me produire, de partager mes émotions via le clavier. J'ai réalisé tous ces concerts seul, sans équipe, c'est un travail acharné mais particulièrement formateur !
De la recherche de dates, à la réalisation du concert, en passant par la communication, c'est un marathon, mais quand arrive le moment de la scène, on comprend pourquoi on fait tous ces efforts.
Quel conseil donneriez-vous à un jeune qui voudrait suivre vos pas en musique ?
Le conseil ultime, c'est de se connaître, de travailler mais avec plaisir, d'être persévérant, mais aussi patient. Il faut aussi rencontrer du monde car c'est par les rencontres que des projets intéressants naissent, et que la créativité est naturellement alimentée. C'est un cheminement, avec son lot d'échecs, de peurs, mais cela fait partie du job. Avoir un bon entourage est une aussi une des clés, cela permet de rester canalisé sur ses objectifs. Je n'ai cependant pas la recette miracle car on est tous différents et je ne suis pas le mieux placé pour donner des leçons, je n'ai pas la vérité infuse, chacun doit faire son chemin, en respectant sa vraie nature. Il ne faut pas faire semblant.
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Extrait du n°3 de Mozaik